ALUNE WADE
BIOGRAPHIE
Alune Wade, 38 ans est né à Dakar le 9 juin 1978. Son père, musicien formé à Paris est à la tête de l’Orchestre Symphonique de l’armée sénégalaise. « Chez moi j’ai écouté du coup beaucoup de musiques différentes. Mon père, imprégné de classique était par exemple amoureux des sonates de Bach. Ma mère, avec d’autres femmes du voisinage faisait résonner la maison de chansons africaines et de soul music. Ma sœur elle m’initiait à la pop, aux variétés venues d’Amérique ou d’Europe… » A sept ans, volonté paternelle oblige, il prend chez lui sa première leçon de piano et de solfège. Quelques années de formation musicale plus tard, les premières envies le démangent, la batterie d’abord avec veto familial immédiat, la guitare ensuite.
Au final le besoin de basse l’emportera malgré tout. Basse électrique, contrebasse, l’instrument aux quatre cordes de base lui parait en filiation naturelle avec l’Afrique « Je suis carrément fasciné par la basse. Instrument très africain de par ses fabuleuses possibilités rythmiques. Elle représente la colonne vertébrale de l’orchestre, lien précieux entre la rythmique et les instruments harmoniques ».
Les références sur cet instrument version électrique, il va les chercher du côté des manches de Stanley Clarke ou Jaco Pastorius. A ce sujet pourtant Alune avoue un modèle, mieux une passion en la personne de Marcus Miller : « J’aime sa manière, son feeling, son toucher sur les cordes. Tout cet univers personnel il l’a gardé intact depuis son passage chez Miles » De quoi considérer comme une étape privilégiée dans sa carrière sa participation au disque « Afrodeezia ». Côté contrebassistes de jazz, il cite volontiers l’influence de Paul Chambers, Charlie Mingus ou Eddy Gomez.
« Le jazz est pour moi une musique de partage puisque liée à tous les continents. Le jazz est née aux Etats Unis oui, mais pour revenir à son histoire j’aime à le comparer à un arbre. Les racines ont poussé de l’Afrique, les feuilles et les fleurs ont éclos en Europe et le tronc a grandi sur les terres d’Amérique ». Le jazz, l’improvisation comme terrain de jeu sont à ses yeux un espace ouvert, une pratique de liberté « Le jazz, jamais on ne lui demande son passeport », et de citer à titre d’exemple les parcours, les compositions écrites pour l’éternité par Duke Ellington, Miles Davis, John Coltrane et, toujours aussi vivant que prolixe, Wayne Shorter.
Autre lieu exploré dans son travail actuel auprès du pianiste Harold Lopez Nussa, Cuba et les riches musiques de l’île. Etape goûteuse d’un voyage entre l’Afrique et l’Amérique, il en a découvert les saveurs dans son giron familial « Une station de radio de Dakar passait tous les dimanches après midi de la musique latine. J’adorais les standards de la musique cubaine, je les enregistrais sur des K7. Je les écoutais tellement souvent que les bandes finissant usées jusqu’à la corde, je volais du vernis à ongle à ma sœur pour les recoller sans perdre trop de son… L’Amérique pour son vivier de musiques sans cesse réactivées, l’Europe et Paris en particulier comme melting pot où il a choisi de vivre ont bien entendu façonné la personnalité d’Alune Wade. L’Afrique demeure pourtant son berceau naturel. Et la musique qui va avec, conjuguée au pluriel « Il existe beaucoup de musiques africaines. Du Mali, du Sénégal, de l’Afrique du Sud mais de l’Algérie ou du Maroc aussi. Au delà de vaines étiquettes j’y trouve tellement de styles, de couleurs, de mélanges. Le tout caractérisé par une évolution actuelle très rapide. Dans les rythmes, les harmonies de l’Afrique d’aujourd’hui j’aime ce mélange, ce métissage permanent » d’où sa volonté de l’appliquer, le faire passer dans sa propre musique.
Dans ses compositions, le travail entrepris à la tête de son nouveau groupe, Alune Wade place désormais une dose de métissage. Il entend faire muter sa musique plutôt du côté du jazz. Mais pas à cent pour cent, histoire de garder trace de ses racines africaines « Je souhaite faire de la musique équitable. Par exemple dans l’album que je prépare le jazz se trouvera métissé au travers de couleurs chaudes de l’afro beat venu du Nigéria. J’ai choisi à dessein des musiciens issus de tous horizons : Brooklyn, Paris, Brésil, Cuba. Ensemble nous jouons, nous improvisons sur les rythmes de l’afro beat ».
Robert Latxague